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vendredi 8 avril 2016

3 ans


Cela fait maintenant plus de 3 ans que je suis a mon compte en tant que photographe. 3 ans que je donne tout. Mon temps, mon argent, mes nerfs... 3 ans que je lutte tant bien que mal fasse a la concurrence plus que trop nombreuse dans ma région. 


3 ans que je suis photographe, secrétaire, graphiste, standardiste, pressing, comptable, informaticienne, couturière, femme de ménage, juriste... 3 ans que je gère tout, toute seule. 

3 ans que le moindre sous que je gagne part en charge ou en investissement. En taxe ou en impôts. 3 ans que je dois justifier mes tarifs. Qu'on me trouve trop chère, ou pas assez. Qu'on me dit que je casse le marché ou qu'il y a moins cher ailleurs. 

3 ans que je serre des dents quand je vois que mes cotisations au RSI augmentent, encore et encore.

3 ans que je stress a l'idée de casser mon matériel que je n'ai même pas pu faire assurer. Que je me démerde avec du matériel chinois parce que j'ai pas les moyens d'acheter mieux. Que je rembourse le crédit d'un appareil photo hors de prix et que je n'ai même pu entrer dans ma compta, faute d'un vrai statut. 3 ans que je bave sur du nouveau matériel que je ne sais même pas si un jour je pourrai me payer.

3 ans que je souris nerveusement et dit oui quand mes clients me demandent d'encaisser leur chèque le mois prochains alors que mon frigo est vide. Que je calcule méticuleusement ce que je gagnerai dans mon mois, et puis finalement je me retrouve avec des annulations de dernières minutes, ou carrément des gens qui ne viennent pas sans prévenir. 

Mais la, depuis le début de l'année, je baisse les bras... Je suis fatigué. C'est peut être la grossesse qui me déprime. Ou peut être la faible charge de travail depuis janvier. C'est vrai que mon dernier trimestre 2015 a été très remplis, a tel point que je me suis demandé si j'allais y arriver... Et la, c'est le calme plat. Je dirai pas que je ne vois personne, mais après avoir passé pas loin d'une centaine de famille en 3 mois, me retrouver avec une ou deux séances par semaine d'un coup, ca fou le moral par terre. Et le compte en banque je vous raconte pas... Finalement, on s'habitue a gagner de l'argent. Et quand il n'y en a pas, on a du mal a reprendre le rythme de "pauvre" qu'on avait avant. A la différence que l'argent qu'on voit sur le compte, on a pas le droit d'y toucher : c'est pour le RSI !

L'autre claque, je me la suis prise lorsque nous somme allé a la banque avec mon namoureux pour se renseigner sur un emprunt immobilier. Quand la banquière m'a dit que mes revenus ne serait jamais pris en considération, parce que mon travail n'est pas "sure", j'ai cru tomber. Vraiment. En fait, je pourrai gagné 30 000 euros par ans que mes revenus ne compterai pas. Parce que je ne suis pas salarié. Alors si on veut acheter une maison, on ne doit compter que sur le salaire de mon namoureux. Et donc avec un salaire d'ouvrier (quoi que finalement très bien payé pour un tel job) ne nous permet pas d'emprunter plus de 95 000 euros. Qu'est ce qu'on a en 2016 pour 95 000 euros quand on est une famille de presque 5 personnes, désireuse d'avoir 4 chambres et un lieux pour travailler ? Bah rien. On reste en location. Location qui ne comprend que 3 chambres, pas de bureau et aucune possibilité d'agrandissement puisque bordel de merde, c'est pas chez nous !

Je me serrai contenter de serrer les dents, encore une foi, si je ne m'étais pas encore cassé la gueule quand j'ai voulu me renseigner sur mes droits pour un congé maternité. Si j'avais été salariée (en partant d'un SMIC) pour un petit troisième, je me serais arrêté du 22 aout (hors congé pathologique) au 12 février. J'aurai profité de ma petite merveille. J'aurai eu des indemnités journalières qui avoisinerai les 30 euros. En tant qu'auto entrepreneur, mes indemnités journalière seront calculées en prorata de mes 3 derniers chiffre d'affaire. Après maintes recherche et appels au RSI, il est donc apparu que mon congé maternité, qui ne durera QUE 44 jours, ne sera indemnisé qu'au hauteur de 5,29 euros par jours. Vous savez quoi ? J'avais pensé idiotement que je resterai arrêté jusqu’à janvier.  Avec un bébé prévu pour le 17 octobre, reprendre 2 mois et demi après me semblait plus que correcte. Mais avec de tel indemnités, tout pile sur la période ou je fais 40% de mon chiffre, c'est juste impensable. Ma mère a sous entendu que j'étais pas obligé de le prendre ce congé et que j'avais qu'a me bouger. Bin oui Maman, toi qui profites sans arrêt de la sécurité sociale, tu es tellement bien placé pour me dire ça !

Tout ca pour dire qu'être a mon compte commence cruellement a me faire défaut. En plus de la fatigue physique et moral, j'ai de moins en moins envie de m'investir. Si je tombais malade ? Si je ne pouvais plus travailler ? Ca se passerai aussi mal ? Et quand je serais a la retraite ? J'aurai encore 5,29 euros par jour ? Et encore, c'est utopique ! Est ce que j'aurai une retraite ?? J'ai l'impression d'être bonne juste a payer. Payer, payer et encore payer ! Et le pire ? Je ne sais même pas pourquoi je paye ! 

Je suis dévastée, parce que cette entreprise, c'est mon bébé. C'était un super projet... mais qui demande bien plus que ce que je ne peux encore donner. Je réfléchis a un plan B. Devenir ATSEM, travailler avec des enfants en bas ages ? Trouver un photographe qui me prenne en tant que salarié ? 

Je verrai tous ca en 2018... Quand j'aurai fini d’honorer mes contrats... L'avenir me dira si mon entreprise perdurera... Ou pas.

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